L'orthographe, un sujet polémique
Les récents changements orthographiques dans les manuels scolaires, comme la disparition partielle de l'accent circonflexe, n'ont pas manqué de faire sursauter les puristes.
En septembre, on voyait ainsi apparaître sur Twitter des hashtags comme #Jesuiscirconflexe ou #Jesuisoignon ; des appels de résistance venant de ceux qui voient dans la réforme de l'orthographe un appauvrissement de la langue.
Les débats sur l'orthographe ne sont pas nouveaux en France. Ils étaient même beaucoup plus virulents il y a quelques siècles de cela. Des débats dans lesquels les imprimeurs ont joué un rôle crucial.
Quand les imprimeurs régnaient sur l'orthographe
L'orthographe de la plupart des langues européennes que nous connaissons aujourd'hui a été mise en place par les imprimeurs, surtout au 16e siècle. À l'époque, l'orthographe n'était pas fixée et des opinions contradictoires étaient publiées sur la question par des spécialistes de la langue comme Robert Estienne ou des écrivains comme Ronsard.
Le grammairien Louis Meigret (1510-1558) défendait l'orthographe phonétique. Il ne voyait pas de raison à ce qu'un mot soit toujours écrit de la même manière. Il y a bien plusieurs façons de cuire un oeuf, pourquoi y aurait-il une seule façon d'écrire un mot ?
Mais le besoin de règles unificatrices se faisait sentir par les imprimeurs ainsi que par les rédacteurs judiciaires afin que les lois et les jugements soient compris de tous.
Geoffroy Tory (1480-1533), l'imprimeur officiel de François 1er, a joué un rôle considérable dans le développement de l'orthographe. Correcteur et imprimeur royal, il a écrit un traité de typographie et introduit de nouveaux caractères comme l'apostrophe (qui vient du grec ancien), la cédille (qui vient d'Espagne) ou encore le point-crochu (la virgule).
Au 18e siècle, on fixe les normes
Jusqu'au 18e siècle, ce sont donc les imprimeurs qui décidaient de l'orthographe et de la ponctuation d'un texte. L'auteur pouvait éventuellement donner son avis, mais les imprimeurs avaient le dernier mot. La situation a commencé à changer notamment avec Diderot qui a défendu le droit d'auteur.
Dans la troisième édition du dictionnaire de l'Académie française publié en 1740, de nombreuses consonnes sont supprimées (comme feste qui devient fête). Les dictionnaires se multiplient et malgré les différences d'une édition à l'autre, se développe une norme orthographique qui perdure aujourd'hui.