"Ce n'est pas seulement un effet, c'est quelque que chose qui touche les limites de la physique, de l'impression, de la science. Cela peut paraître impossible, mais j'ai les résultats sous les yeux !", avertit Lorenz Boegli, fondateur de l'Atelier für Siebdruck Lorenz Boegli. Cet imprimeur qui dit ne savoir rien faire d'autre dans la vie que de la sérigraphie n'a ni plus ni moins inventé l'impression RVB.
Lorenz Boegli travaille avec ses trois salariés dans son atelier de sérigraphie en Suisse pour des imprimeurs offset suisses, français et italien, pour des marques de luxe et des graphistes indépendants.
Sa spécialité ? "Des trames fines avec des pigments iridescents et métalliques. Techniquement c'est difficile, car il faut de gros pigments et donc de gros maillages qui empêchent les demi-tons." Mais le sérigraphe a trouvé un moyen de résoudre ce problème, et préservant son secret de fabrication, il résume par ces mots : "De fins dessins avec de gros pigments."
Le CMJN remplacé par le "RVBBl"
Depuis des années, il utilise les encres iridescentes de la marque allemande Merck. Et il y a trois ans, il remarque qu'il est possible de faire une quadrichromie additive avec ces pigments et en fait la demande au fabricant.
"Et dès le premier test, ça a fonctionné !" Il explique : "Ces pigments iridescents, la gamme Spectraval de Merck, ont la caractéristique unique de créer une troisième couleur lorsqu'ils sont superposés. Une superposition de rouge, vert et bleu donne du blanc sur un papier noir ! J'imprime en RVB avec du blanc irisé pour les hautes lumières." Et ce "RVBBl" est l'équivalent du CMJN.
"En fait, je n'imprime pas des couleurs, mais des reflets de lumière. C'est là que réside le secret du procédé", nous confie-t-il.
Un rendu en impression RVB surprenant
Ce procédé prodigue un effet métallisé et nacré, parfait pour les impressions de bijoux, de voitures ou de montres. "Le rendu de ces impressions est beaucoup plus beau parce que les couleurs sont intégrées à l'effet métallisé et le rendu est très surprenant."
Et cette impression additive a déstabilisé plus d'un professionnel : "Un professeur de physique d'une université de technologie allemande m'a dit en rigolant qu'il était 'furieux', car j'avais bafoué les règles des sciences naturelles !"
Le travail innovant de Lorenz Boegli primé
Le travail de l'imprimeur a aussi été remarqué récemment à la Fespa 2017. Il a remporté le prix le plus convoité du concours d'impression du salon du grand format et de la sérigraphie, le prix Best in Show, pour Le Monde des Effets, un journal imprimé en RVB sur papier noir. (lire Voici les réalisations des gagnants de Fespa Awards 2017).
Et le magazine allemand sur l'emballage Creativ Verpacken va utiliser le savoir-faire de Lorenz Boegli pour sa couverture (10 000 exemplaires) du mois de septembre qui sera dédié au salon Luxe Pack de Monaco.
Une découverte à étendre aux autres procédés d'impression
Les différents sérigraphes qui ont essayé ce nouveau procédé n'auraient pas réussi à avoir les mêmes résultats. "Ils sont déçus de leurs rendus, je pense, à cause du problème de fins dessins et de gros pigments".
Cependant il souhaiterait que cette découverte ne reste pas confidentielle. "Si ce procédé reste que dans le secteur de la sérigraphie, il sera très restreint (4 % du marché de l'impression). Il serait très intéressant de trouver des solutions pour la gravure, la flexographie et le jet d'encre (il faut trouver le moyen d'avoir des gouttes de 10 à 15 microns)."
Il précise : "C'est impossible à transposer à l'offset : l'épaisseur de l'encre est trop fine pour pouvoir refléter la lumière."
Le sérigraphe cherche encore à améliorer la séparation des couleurs pour étendre la gamme de chromatiques. Et il travaille également sur un effet inédit parfait pour le secteur de la bijouterie dans le monde de l'impression…