Privée de subvention, l'imprimerie pour détenus va peut-être fermer (14)

Jean-Baptiste Delaby dans l'atelier de l'imprimerie du centre pénitentiaire de Caen.

Lieu unique en France, l'imprimerie de la prison de Caen forme depuis plus de 30 ans les détenus aux métiers de l'imprimerie.

Depuis 1985, l'association Artec forme les détenus du centre pénitentiaire de Caen aux métiers de l'imprimerie.

Ce programme de réinsertion des prisonniers est financé à 40 % par le conseil régional qui verse chaque année 45 000 euros de subventions. Les 60 % restants du budget de l'atelier proviennent de sa propre production.

Or cette année, cette production pourrait bien s'arrêter. Les élus ont en effet décidé de couper les subventions, estimant que l'Artec, en tant que prestataire de formation, devait être soumise à la concurrence des marchés publics. Or la région n'a pas lancé d'appel d'offres.

Le manque d'argent et le fait que l'imprimerie est un secteur en difficulté (cela ne vaut donc pas le coup de former des personnes à ces métiers) sont également les raisons avancées par la Région, explique Jean-Baptiste Delaby, président de l'Artec.

Mais sans ce financement, l'avenir de ce programme de réinsertion est compromis et pourrait même s'arrêter dès l'été prochain, prévient-il. Pour l'instant, aucune autre solution n'a été trouvée.

"On se démène pour trouver une formule d'avenir mais ce n'est pas simple. Il faudrait un miracle", regrette Jean-Baptiste Delaby.

La formation a un coût

Installée au cœur du centre pénitentiaire de Caen, l'imprimerie souffre comme ses confrères des difficultés du marché (concurrence, digitalisation, etc.). "L'année 2017 a été plutôt bonne, mais 2018 ne commence pas bien."

La clientèle est composée à 50 % d'associations et à 30 % d'individuels. Le reste est réparti dans plusieurs secteurs, notamment les administrations.

Mais outre la conjoncture, l'imprimerie n'a pas vocation à être totalement rentable.

"Nous sommes avant tout un prestataire de formations. La plupart des opérateurs qui sont à l'atelier n'y connaissent rien lorsqu'ils débutent. Nous leur fournissons une formation avec l'objectif de présenter le bac professionnel des industries graphiques. Cela représente une charge et un coût. Les opérateurs ne sont pas opérationnels comme peuvent l'être ceux d'une entreprise."

Un programme de réinsertion qui a fait ses preuves

Au-delà de la formation professionnelle, le travail offre aux détenus une préparation à la réinsertion. Un point sur lequel insiste Jean-Baptiste Delaby et qui est, selon lui, mal compris par les élus.

"Le travail à l'imprimerie représente tout un parcours. Il ne s'agit pas uniquement d'une formation professionnelle mais également d'une formation citoyenne, d'une formation personnelle pour que la réinsertion se passe dans les meilleures conditions."

Et les résultats sont là. Depuis sa création, la formation a accueilli une centaine de détenus. "Je n'ai eu aucun retour de récidive. Au contraire, j'ai eu des retours positifs, de personnes qui se sont bien réinsérées, qui ont été embauchées et ont repris confiance en elles".

L'imprimerie associative produit des dépliants, brochures, affiches, calendriers, cartes de visite, faire-parts et livres. Au niveau du parc machine, elle comprend notamment deux presses offset Ryobi, une 4 couleurs (la quadri est nécessaire pour présenter le bac pro) et une monochrome, ainsi que deux imprimantes numériques.

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