Interview / Lycée professionnel Baggio à Lille : "Une voie d'excellence !"

© Lycée Baggio

J'ai eu la chance d'interviewer le proviseur du Lycée César Baggio, Abdélaziz Kissany, et son directeur de travaux en charge de la section graphique, Mohamed El Mourabit, qui nous présentent la formation offerte par l'établissement et font pour nous un état des lieux de l'enseignement technique en France.

Comment ne pas voir cet immense ensemble scolaire de Baggio le long du périphérique sud de Lille ? Une construction typique du nord des années 30 avec ses briques jaunes et son entrée monumentale tournée vers le sud. Le lycée César Baggio est une des références lilloises dans l'enseignement technique du technopôle nordiste aux ambitions européennes.

Le lycée professionnel une voie d'excellence !

J'ai rencontré leurs dirigeants le proviseur, Abdélaziz Kissany, et le directeur de travaux, en charge de la section graphique du pôle lycéen de Baggio, Mohamed El Mourabit.
"Le lycée professionnel est une voie d'excellence de formation en France", c'est en ces termes que débute notre entretien.

Abdélaziz Kissany, proviseur du Lycée Baggio à Lille.
Mohamed El Mourabit, directeur délégué aux formations en charge des industries graphiques du lycée Baggio.

Léonce Deprez : Quelle est la différence entre le lycée technique et le lycée professionnel ?
Abdélaziz Kissany et Mohamed El Mourabit : À l'origine, le lycée professionnel formait dès la seconde des élèves capables d'être employés en entreprise après l'obtention d'un CAP en deux ans ou un bac pro en trois ans. Ils pratiquaient beaucoup d'ateliers. Aujourd'hui, compte tenu de la demande des entreprises en élévation du niveau technique, ils forment des étudiants pour faire un BTS, un bac plus deux années. Nous donnons des compétences qui leur permettent d'évoluer dans leur métier. Le lycée technique, plus théorique dans son enseignement technique général avant le bac, forme des élèves destinés au bachelor universitaire de technologie (BUT), dispensé par les IUT. Nous avons progressivement harmonisé nos diplômes français aux normes européennes, la licence maîtrise doctorat ou LMD.

Quels sont les effectifs du Lycée César Baggio ?
Il y a 1800 apprenants dans la cité scolaire, dont 450 en lycée professionnel, 314 en lycée technique, et 356 en BTS, dont 50 % viennent du lycée professionnel.

Quel est votre sentiment sur l'évolution de l'enseignement technique en France ?
Excellent ! Le dénigrement du technique, voie de garage, n'existe plus aujourd'hui dans la conscience collective des professeurs et des parents d'élèves. Il est vrai que longtemps les métiers techniques étaient considérés comme dégradants, et pratiqués dans des ateliers bruyants et peu modernes.
Aujourd'hui, l'introduction du numérique dans toutes les entreprises a totalement bouleversé la donne. Le numérique est présent dans tous les domaines, aussi bien sur les machines que dans les bureaux. L'enseignement technique nécessite des compétences élevées qui permettent une meilleure adaptabilité. La demande des élèves augmente surtout dans tous les métiers liés à la transition énergétique. Nous manquons aujourd'hui de quatre professeurs pour assurer l'enseignement.

Les jeunes à la redécouverte des métiers techniques

Quels sont les freins à cette évolution positive ?
Depuis 50 ans, on a eu une désindustrialisation ! Les jeunes n'ont plus les repères de leurs parents qui avaient tous dans leurs familles des soudeurs, des charpentiers, des maçons, des chaudronniers… Ils redécouvrent les métiers techniques sans ces référents et c'est long.
Et l'industrie de production a encore un long chemin à faire pour améliorer son image, ternie encore par les images de fermetures d'usine, de salaires supposés faibles, du travail posté pénible ! Pourtant, la demande des entreprises est très forte. Les élèves deviennent conscients que le travail est assuré à leur sortie d'école. Ils sont exigeants !

Venons-en à votre section métiers graphiques !
C'est notre plus ancienne section. Elle fut créée à la fondation de l'Institut Diderot en 1936 ! Aujourd'hui, elle s'appelle Études de réalisation de produits de communications. Nous formons chaque année 45 élèves au bac pro, qui dure donc 3 ans. 50 % d'entre eux partent en BTS et nous sortons 45 BTS chaque année plus 15 à 20 étudiants en apprentissage. C'est la seule unité de formation supérieure au nord de Paris.

Avez-vous des problèmes de recrutement comme il en existait il y a encore dix ans ?
Non, plus maintenant. Nous avons développé tout un réseau de relations dans toute la région des Hauts de France et la section apprentissage est constamment alimentée. Les jeunes ont conscience que le diplôme débouche automatiquement sur un emploi. À noter l'augmentation régulière d'étudiantes dans la section. Ce qui indique une amélioration de l'image de la filière graphique. La féminisation d'une profession est un gage de modernité.

Votre conclusion ?
L'enseignement technique est une voie d'excellence et élève en dignité les étudiants. Nous travaillons en partenariat avec tous les grands groupes industriels, surtout dans l'énergie, les communications, les industries hautement technologiques. Nos opérations portes ouvertes révèlent un véritable engouement pour nos formations et quelque 150 entreprises participent à ces journées. J'ajoute que le gouvernement est très attentif à l'enseignement technique. Carole Granjean, ministre déléguée à l'Enseignement professionnel, nous réunit souvent. L'environnement est vraiment très positif !

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