Edito / Souveraineté, transition écologique et défi local : le prospectus en quête d'équilibre

Alors que la Coopérative U poursuit sa démarche de soutien à l'économie française, son engagement envers le prospectus imprimé en France interroge les professionnels de l'imprimerie, de la distribution et de la grande consommation. Face aux enjeux environnementaux et à la montée en puissance du numérique, Dominique Schelcher, PDG de la Coopérative U, met en lumière un modèle alliant souveraineté et résilience, tout en adressant les défis d'un secteur en transformation.

"Je suis fier de rappeler, que pour une année de plus en 2025, les tracts Coopérative U seront bel et bien encore imprimés en France." 

Dans un contexte de transition écologique et de développement des supports numériques, la Coopérative U s'impose avec une stratégie visant à soutenir la filière française du papier imprimé. Alors que de nombreux acteurs s'orientent vers le tout numérique, la coopérative choisit un modèle hybride pour son prospectus, emblème d'une communication de proximité. Ce choix met en avant plusieurs problématiques pour les imprimeurs et distributeurs qui cherchent à préserver la place de ce support dans un environnement en mutation.

Maintien du prospectus papier : un engagement de souveraineté pour l'imprimerie française

Depuis 2020, la Coopérative U a opté pour une relocalisation de l'impression de ses prospectus en France. Ce choix, fait en pleine pandémie, répond à un double objectif : apporter un soutien concret à une filière impactée par les délocalisations et préserver une certaine souveraineté économique. L'enjeu, cependant, est d'en évaluer les retombées, notamment pour les imprimeurs français qui doivent s'adapter aux fluctuations de la demande et aux contraintes écologiques.

L'impression nationale représente un coût plus élevé, mais elle garantit un soutien continu à l'économie locale. Pour les imprimeries partenaires, cette fidélité à l'origine France implique une gestion optimisée des ressources et des procédés, notamment en matière de choix de papier et d'encres écologiques. Néanmoins, cet équilibre économique reste fragile, d'autant plus dans un marché en proie à la dématérialisation et à la montée des exigences environnementales.

Digitalisation progressive : trouver l'équilibre entre papier et numérique

Avec le développement de l'application Mon Magasin U, la Coopérative U offre un accès numérique aux informations commerciales, s'inscrivant dans une tendance de réduction des supports papier. Cette transition numérique s'accélère, particulièrement dans les zones où la législation Oui-Pub impose de nouvelles restrictions. Cependant, la question se pose de savoir si ce modèle numérique répond vraiment aux attentes de tous les consommateurs.

Le numérique est souvent perçu comme une alternative écologique au papier. Cependant, plusieurs études, dont celles de l'ADEME en 2024, rappellent que l'impact environnemental du numérique est parfois équivalent, voire supérieur à celui du papier. Pour les imprimeurs, cette réalité pourrait s'avérer une opportunité pour redéfinir la place du papier en démontrant son potentiel de durabilité.

Au-delà de la publicité, le prospectus reste un support essentiel pour les commerces de proximité.

Pour de nombreux consommateurs, surtout en milieu rural, le prospectus papier reste un lien privilégié avec les offres commerciales locales. Ce support encourage une consommation locale, limitant ainsi le recours aux plateformes numériques dominées par les géants de la tech américains et chinois. Les imprimeurs et distributeurs s'accordent à dire que cette approche locale du prospectus crée un lien avec le consommateur. Pourtant, ce modèle de diffusion subit des tensions économiques : la baisse des volumes imprimés entraîne des répercussions sur les distributeurs de prospectus, un secteur largement dépendant des grands volumes pour compenser les coûts.

Le modèle de distribution doit évoluer pour répondre aux attentes du marché et des distributeurs.

Les sociétés de distribution de prospectus en boîte aux lettres font face à un modèle économique en crise, principalement dû à la réduction des volumes. Avec la fermeture récente de l'un des principaux acteurs, Adrexo Milee, ce secteur montre des signes de fragilité qui s'accentuent face à des tarifs historiquement bas. La hausse des coûts de matières premières et la diminution des volumes distribués ont impacté fortement cette filière. Lire : Point de vue / Liquidation de Milee (ex-Adrexo) : quand le cadre législatif scelle le sort d'un secteur en crise

Un manque de vision collective freine la transition du prospectus dans le commerce de demain.

Dans une tribune en décembre 2022, Dominique Schelcher évoquait le manque de vision collective pour le futur des filières imprimées en France. La transition écologique et numérique nécessiterait, selon lui, un accompagnement structuré et des décisions politiques adaptées. La Coopérative U, en soutenant activement la production nationale de prospectus, souhaite contribuer à une réflexion globale sur l'avenir de la filière. Cet engagement appelle à un dialogue entre les différents acteurs du secteur et les décideurs publics, pour repenser le modèle économique, social et environnemental de la publicité imprimée.

Cap ou pas cap, comme disent les enfants. Pourquoi ne pas réunire tous les acteurs autour de la table, imprimeurs, clients mais aussi les marques commerciales comme FSC, PEFC, la société CITEO, l'ADEME, La poste... autour de la création d'un nouveaux labels. Ce label viserait à revaloriser le métier de distributeur en garantissant des conditions équitables. Une telle initiative pourrait non seulement soutenir l'économie locale, mais aussi offrir une alternative de qualité aux consommateurs attachés au prospectus. Pour les imprimeurs et distributeurs, cette vision pourrait aboutir à des solutions innovantes permettant de maintenir le prospectus tout en l'adaptant aux enjeux écologiques.

Tribune de 

Cette semaine, j'encourageais ici nos clients à acheter français pour leur alimentation. Coopérative U s'engage elle aussi à choisir l'origine France dans ses achats de fournitures, une autre façon de soutenir notre économie. C'est le cas pour nos prospectus. Je vous explique...

Arrêt de la distribution massive surtout dans les zones Oui-Pub, réduction de la pagination et des volumes pour moins d'impact, développement de la diffusion via l'appli Mon Magasin U… Beaucoup de chantiers ont été engagés autour de ce prospectus dont on prédit de longue date la fin. Mais nous ne sommes pas des extrémistes de leur disparition et, surtout, nous essayons de penser aux autres acteurs de la chaîne.

Notre enseigne a pris la décision en 2020, au plus fort de la pandémie, de relocaliser l'impression de l'ensemble de ses prospectus sur le territoire national pour soutenir la filière de l'imprimerie qui en avait bien besoin. Un choix important au regard de son coût, mais un soutien utile à la souveraineté que nous défendons. Je suis fier de rappeler, que pour une année de plus en 2025, les tracts Coopérative U seront bel et bien encore imprimés en France.

La transition s'est engagée, mais le tract papier reste un incontournable pour bon nombre de clients, surtout à la campagne. À l'approche de la fin d'année, je me demande même ce que deviendrait la liste au père Noël sans les prospectus dans de nombreux foyers où l'on découpe encore les catalogues en famille…

Certes, on réduit la voilure pour éviter le gaspillage, on digitalise, et il faut encore chercher la meilleure version du prospectus de demain, mais nous ne renions pas notre engagement dans l'attente. Un petit soutien U à une filière qui reste chahutée en ce moment.

J'écrivais en décembre 2022 dans une tribune au titre évocateur, "Le prospectus, c'est bien plus que du papier" : "Sur ce sujet comme sur tant d'autres, nous manquons encore cruellement en France de vision collective de l'avenir de nos filières et d'accompagnement des transitions qu'elles doivent nécessairement suivre." Triste est le constat que cette vision manque encore et toujours. Nous essayons en tout cas d'y apporter notre petite pierre.

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