Asia Pulp and Paper, la certification FSC suspendue

FSC a décidé de suspendre temporairement son accord avec Asia Pulp and Paper en raison d'un changement de propriété. Cette décision intervient dans un contexte marqué par des controverses persistantes sur les pratiques commerciales et environnementales d'APP et du groupe Paper Excellence.

Le Forest Stewardship Council (FSC) annonce la suspension le protocole d'entente signé avec Asia Pulp and Paper (APP) jusqu'à la fin du mois de mars 2025. Cette décision est directement liée à l'annonce selon laquelle Jackson Wijaya, déjà propriétaire bénéficiaire de Domtar, deviendra également l'unique propriétaire bénéficiaire d'APP. Ce transfert de propriété, approuvée par la Commission européenne en décembre dernier, suscite des interrogations sur les impacts juridiques et environnementaux de cette concentration, dans un contexte où les liens entre APP et le groupe Domtar (qui a intégré Paper Excellence - avec Fibre Excellence basé en France - et le Canadien Produits forestiers Résolu) alimentent les débats depuis plusieurs années.

Des controverses anciennes sur des pratiques commerciales et environnementales

En 2007, FSC avait stoppé la certification d'APP en raison de pratiques forestières destructrices, incluant la déforestation et des conflits avec des communautés locales en Indonésie. Parallèlement, Paper Excellence, créé en 2006 et appartenant à la famille Wijaya, a procédé à de nombreuses acquisitions en Amérique du Nord et en Europe, tout en conservant ses certifications FSC et PEFC. Cependant, une enquête internationale menée en 2023 par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) dans le cadre du projet Déforestation Inc. a révélé des liens structurels entre APP et Paper Excellence, qui seraient pourtant officiellement distincts.

Un système global mis en cause

Selon l'enquête, APP et Paper Excellence fonctionneraient en tandem pour influencer le marché mondial du papier tout en contournant les règles de concurrence. Ces accusations reposent sur des documents internes, des échanges commerciaux et des témoignages d'anciens dirigeants. Les pratiques dénoncées incluent l'utilisation des certifications FSC de Paper Excellence pour légitimer des activités en lien avec APP, ainsi que des échanges d'informations contraires au droit de la concurrence.

Des inquiétudes partagées par les ONG et les institutions publiques

L'association pour la nature WWF et d'autres ONG ont exprimé des réserves importantes sur l'impact de cette concentration sous le contrôle de la famille Wijaya. Ces groupes demandent au FSC d'appliquer rigoureusement sa politique d'association et d'examiner les certifications des entités liées à APP, dont Domtar et Resolute Forest Products.

En France, la filiale Fibre Excellence a également fait l'objet d'investigations médiatiques et institutionnelles, bien qu'elle ait nié tout lien avec APP et continue de promouvoir son rôle dans l'industrie européenne.

Des enjeux majeurs pour les marchés et les certifications

La suspension temporaire du protocole d'entente entre APP et le FSC met en lumière la complexité croissante des chaînes d'approvisionnement forestières et papetières. Si le FSC doit encore conclure son évaluation juridique indépendante, les implications pour les certifications FSC et PEFC de Paper Excellence, Domtar et leurs filiales sont cruciales. Ces certifications jouent un rôle clé pour accéder aux marchés sensibles aux critères environnementaux, notamment en Europe et en Amérique du Nord.

Focus sur les pratiques en Europe

En Indonésie, APP est confrontée à des accusations de déforestation et de destruction d'écosystèmes depuis des décennies, tandis qu'en Europe, Paper Excellence poursuit des investissements massifs pour moderniser ses infrastructures. En France, par exemple, Fibre Excellence a récemment investi dans ses usines de Tarascon et Saint-Gaudens (lire Nouveau départ pour l'usine de pâte à papier Fibre Excellence Provence).
Ces actions pourraient renforcer sa légitimité industrielle, mais elles n'écartent pas les soupçons persistants concernant ses liens avec APP.

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